CONSIDÉRANT LA VIOLENCE...
du cyclone, aussi extraordinaire qu’est le mépris pour la question des bouleversements climatiques en cours et à venir, aussi sidérante qu'est la cécité organisée devant les désastres à revenir ;
de l’abandon qui s’avère le nom précis d’une politique consistant à délaisser l’île lointaine, vaguement nationale depuis des décennies, et laisser en ces confins se dégrader le bidonville, au point qu’il s’effondre et tue ;
de l’hostilité caractéristique de politiques migratoires contemporaines s’acharnant à ajouter à la souffrance de l’exil par delà les mers, la souffrance de la précarité sur les rivages, en détruisant les abris notamment, bien avant que le cyclone s’en charge ;
de l’aveuglement qui fait dire aujourd’hui en haut lieu que la cause de la catastrophe c’est le migrant lui-même, coupable de sa présence sous les débris, et que la solution est la fermeté aux frontières et la pauvreté maintenue au loin ;
de l’incurie d’un gouvernement démissionnaire (ou sur le point de l'être de nouveau) programmant, en lieu et place d’un extraordinaire projet de deuil et de soin pour toutes et tous, l’oubli plus encore de la ville officiellement indésirable et des vies manifestement surnuméraires.
CONSIDÉRANT LE SOIN...
qu’en contrefeu il nous faut porter aux morts, car rien ne pourra s’envisager sans un relevé précis des vies et des lieux disparu.e.s, sans la constitution de la mémoire de ce que les violences multiples ont anéanti ;
qu’en urgence il nous faut apporter aux vivants grâce à une communauté nationale et internationale qui ne peut pas ne pas être aussi émue et mobilisée que lorsque les cathédrales prennent feu ;
que radicalement il nous faut déployer au moyen d’architectures agiles au sein d’espaces sécurisés et sanctuarisés, avec et pour celles et ceux qui ont survécu, non sans la solennité et les prières ;
qu’inlassablement il nous faut faire grandir, en s’appliquant dès maintenant à écrire le temps long d’une île vivante d’être hospitalière, que seules les courtes vues peuvent conduire à murer.
NOUS CONTRIBUONS ET CONTRIBUERONS AUTANT QUE NOUS LE POURRONS...
à compter aujourd’hui les forces, les lieux encore solides, les matériaux disponibles, les soutiens et ressources alentours, en Afrique notamment ;
à déployer aussitôt que possible des îlots d’hospitalité, des lieux provisoires d’accueil, de repos, de soin inconditionnel ;
à tracer le chemin d’une re-construction, nécessitant de constituer la mémoire de ce qui n’est plus (des vies méprisées, des bidonvilles délaissés) et d’écrire l’histoire de ce qui doit être (des vies considérées, des villes consolidées) ;
à construire une vision renouvelée de Mayotte, articulée comme toutes les terres à tous les lointains, de ses habitants, soumis exactement aux mêmes vents qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs, de l’hospitalité vive que sur les rivages il nous faut savoir faire advenir, en dépit des violences de tous ordres qui ne cesseront de faire de ce chantier un chantier à faire.
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